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Le Cinquième Élément  : l’air qui a mis la science-fiction en PLS

Si vous croyez que l’opéra c’est pour les vieux, et que la science-fiction, c’est juste des lasers et des vaisseaux spatiaux, Le Cinquième Élément de Luc Besson est là pour vous clouer le bec, et avec style. Au milieu d’un film déjà complètement barré (au sens noble, hein), il y a une scène qui surpasse tout le reste : le concert de la diva Plavalaguna.

Ce film, c’est un délire visuel. Une explosion de couleurs, de costumes signés Jean-Paul Gaultier, des créatures venues d’ailleurs. C’est un film qui part dans tous les sens, mais au fond de tout ça, son cœur, son âme, c’est une scène musicale. Un récital d’opéra donné par une diva extraterrestre bleue.

Sur le papier, c’est un peu un coup de folie. Placer un grand air d’opéra au milieu d’un blockbuster de science-fiction, c’est risqué. Mais la scène du « Diva Dance » est bien plus qu’une pause dans l’action. C’est une fusion parfaite entre la grâce et la violence, le classique et le futuriste. Et je crois que cette scène, c’est la clé pour comprendre tout le film.

Des méchants et des gentils

L’histoire, pas de fioritures : tous les 5000 ans, un Mal absolu menace l’univers. La seule chose capable de l’arrêter ? Une arme suprême composée de cinq éléments : quatre pierres représentant l’eau, la terre, le feu et l’air, et un cinquième élément, parfait, un être suprême.

Bienvenue au 23e siècle. Le Mal est de retour. L’armée recrée le cinquième élément à partir d’un fragment d’ADN. Ça donne Leeloo, une jeune femme surhumaine, jouée par Milla Jovovich. Elle s’échappe et tombe, littéralement, dans le taxi de Korben Dallas (Bruce Willis), un ancien militaire devenu chauffeur de taxi cynique et fauché.

Leur mission, s’ils l’acceptent (et spoiler alert, ils n’ont pas trop le choix) : retrouver les quatre pierres manquantes. Elles sont planquées… dans le corps de la diva Plavalaguna. Ils doivent la rejoindre sur une planète-croisière de luxe. Mais attention, ils ne sont pas seuls. Le terrible Zorg (Gary Oldman) et une bande de mercenaires extraterrestres, les Mangalores, sont aussi dans la course.

Le Pourquoi : Créer un Son Inhumain

Pour cette scène clé, Luc Besson et son compositeur attitré, Éric Serra, ne voulaient pas juste un air d’opéra. Ils voulaient créer quelque chose de familier et en même temps totalement extraterrestre. La première partie du morceau est donc un air classique bien réel : un extrait de Lucia di Lammermoor de Donizetti. C’est la partie qui nous ancre dans quelque chose de beau, d’émouvant, de… humain.

Mais la deuxième partie ? C’est de la pure création. Serra compose une partition futuriste, avec des notes qui montent et descendent à une vitesse folle. Le but ? Composer un morceau techniquement impossible à chanter pour un être humain. Il pensait que seule une machine, un synthétiseur, pourrait exécuter une telle prouesse vocale. Voilà l’idée : créer un son surhumain pour une créature qui ne l’est pas.

L’Anecdote : Le Défi de la Chanteuse Inva Mula

Et là, le twist. Pour enregistrer la partie « humaine » de l’opéra, la production engage la soprano albanaise Inva Mula. Après avoir enregistré l’aria de Donizetti, elle jette un coup d’œil à la partition « impossible » de Serra. Et là, surprise. Elle annonce qu’elle peut la chanter.

Éric Serra, convaincu que c’est une mission impossible, est sceptique. Mais Inva Mula, en bonne diva, s’exécute. Elle réussit à chanter une grande partie des notes à une vitesse et avec une précision que Serra pensait hors de portée de la voix humaine. La légende raconte qu’elle aurait souri et dit : « En tant qu’humains, on est limités, mais on peut tricher un peu. »

La vérité ? Un peu des deux. Inva Mula a bel et bien réalisé une performance vocale exceptionnelle, poussant la voix humaine dans ses retranchements. Mais pour obtenir la perfection et la vitesse inhumaine de la version finale, Serra a « triché » un peu. Il a enregistré les notes une à une, puis les a assemblées et superposées numériquement. Résultat : un mélange de virtuosité humaine et de manipulation technologique.

Structure de l’œuvre

Partie A (0:00-1:20)

Adaptation de « Il dolce suono »

  • 🎵 Respect de la ligne bel cantiste traditionnelle
  • 🎵 Phrasé lyrique et émotionnel
  • 🎵 Base issue de l’opéra Lucia di Lammermoor de Donizetti
  • 🎵 Maintien des ornements classiques

Partie B (1:20-2:10)

Composition originale d’Éric Serra

  • 🎵 Vocalises suraiguës à vitesse impossible
  • 🎵 Sauts d’octaves impressionnants
  • 🎵 Rythme syncopé et percussif
  • 🎵 Section purement instrumentale à l’origine

Partie C (2:10-fin)

Fusion des deux styles

  • 🎵 Superposition des thèmes classique et moderne
  • 🎵 Conclusion virtuose et techniquement audacieuse
  • 🎵 Création d’un dialogue musical inédit
  • 🎵 Apothéose émotionnelle et narrative

Caractéristiques Vocales

Tessiture

  • 🎵 Couvre plus de 3 octaves
  • 🎵 Étendue exceptionnelle pour une voix classique
  • 🎵 Exploitation des registres grave, medium et suraigu
  • 🎵 Défis techniques sur les passages de transition

Agilité

  • 🎵 Coloratures extrêmement rapides
  • 🎵 Précision rythmique millimétrée
  • 🎵 Articulation parfaite malgré la complexité
  • 🎵 Maîtrise du staccato et du legato

Puissance

  • 🎵 Dynamique contrastée
  • 🎵 Contrôle respiratoire exceptionnel
  • 🎵 Variations dynamiques expressives
  • 🎵 Projection vocale dans tous les registres

Innovation

  • 🎵 Fusion des techniques classiques et modernes
  • 🎵 Utilisation novatrice des résonateurs
  • 🎵 Dépassement des conventions lyriques
  • 🎵 Création d’un nouveau standard vocal

La Scène : L’Opéra-Combat

Mais le vrai génie de la scène, c’est son montage. Tandis que la diva Plavalaguna livre sa prestation vocale sur scène, Leeloo, elle, se bat en coulisses contre un groupe de Mangalores. Luc Besson choisit de monter les deux actions en parallèle.

La musique devient alors un « opéra-combat ». La grâce et la beauté de l’aria accompagnent la brutalité des coups de Leeloo. Et quand la musique bascule dans sa partie « alien », rapide et saccadée, le rythme colle parfaitement à la vitesse surhumaine des arts martiaux de Leeloo. La musique ne fait plus que suivre l’action, elle la magnifie. Elle nous montre que Leeloo, tout comme le chant de la diva, est à la fois belle et mortelle, divine et violente.

Au final

La scène du « Diva Dance » n’est pas juste une pause musicale. C’est le film en miniature. 3 semaines de tournage pour 5 minutes d’écran inoubliables. Un mélange improbable de genres (opéra, science-fiction, action) qui ne devrait pas fonctionner, mais qui atteint une forme de perfection. C’est un moment où la grâce et la brutalité se rencontrent, où la musique ne se contente pas d’accompagner les images, mais les fusionne.

Éric Serra voulait créer un son impossible à chanter. Il a presque réussi. Mais la performance d’Inva Mula a prouvé que la voix humaine pouvait aller bien au-delà de ce qu’on imagine. Cette scène reste un moment d’histoire du cinéma, un instant où la musique est devenue, le temps d’une chanson, le véritable cinquième élément.

Le Cinquième Élément

Film : Le Cinquième Élément
Sortie : 21997
Réalisateur : Luc Besson
Acteurs Principaux : Bruce Willis, Milla Jovovich, Gary Oldman
Genre : Action, Science Fiction

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